C’est un coup dur pour l’économie sénégalaise. Le Fonds monétaire international (FMI) a suspendu la mise en œuvre du programme d’aide de 1,8 milliard de dollars (environ 1 080 milliards F CFA) conclu avec le Sénégal. Cette décision survient après la découverte de fausses déclarations dans les comptes publicsentre 2019 et mars 2024, période correspondant à la fin du régime de l’ancien président Macky Sall.
L’affaire a éclaté à la suite d’un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF), confirmé par la Cour des comptes, mettant en lumière des irrégularités dans la présentation des finances de l’État. L’institution de Bretton Woods a aussitôt réagi en gelant le programme d’appui, dans l’attente d’un audit complet.
« Nous n’avons pas encore de calendrier précis pour la reprise des négociations », a déclaré Julie Kozack, directrice de la communication du FMI, lors d’un point de presse tenu jeudi dernier. Elle a précisé que l’organisation poursuivait sa collaboration avec les autorités sénégalaises pour « résoudre le dossier complexe des fausses déclarations ».
Ce gel intervient alors que le gouvernement de Bassirou Diomaye Faye, porté par des engagements forts en faveur de la transparence et de la justice sociale, fait face à des défis économiques considérables. Le programme avec le FMI représentait une bouffée d’oxygène budgétaire pour financer des réformes sociales ambitieuses, notamment dans les domaines de l’emploi, de l’éducation, de la santé et des subventions.
Le ministre des Finances et du Budget, Cheikh Diba, avait annoncé en avril son espoir de conclure un nouvel accord avec le FMI en juin. Cet espoir semble aujourd’hui compromis.
Pour le FMI, la priorité est désormais l’achèvement d’un audit rigoureux. La confiance entre l’institution internationale et le Sénégal a été ébranlée par les manipulations comptables révélées. Des sources proches du dossier indiquent que le retour à la normale dépendra de la capacité du nouveau gouvernement à faire toute la lumière sur la gestion passée, à identifier les responsabilités, et à rétablir les mécanismes de transparence budgétaire.
« Il ne s’agit pas seulement de chiffres erronés, mais d’un problème de gouvernance », analyse un économiste sénégalais. « Ce gel du programme est un avertissement à double tranchant : pour le régime actuel, c’est l’occasion de prouver sa volonté de rupture. Pour les partenaires internationaux, c’est un test de crédibilité. »
En l’absence du soutien du FMI, les marges de manœuvre budgétaires du Sénégal se réduisentconsidérablement. Le pays est confronté à une dette croissante, à des besoins de financement urgents, et à une pression sociale alimentée par les attentes de changement.
Les conséquences pourraient également s’étendre aux marchés financiers. Une dégradation de la notation souveraine du Sénégal par les agences internationales n’est pas à exclure si la situation perdure.
Le gouvernement Diomaye Faye est à un tournant stratégique. Sa capacité à restaurer la confiance, à assainir la gestion publique et à rouvrir le dialogue avec le FMI dans les mois à venir déterminera en grande partie la trajectoire économique du pays pour le reste du quinquennat.