L’arrêté ministériel interdisant l’usage du téléphone portable dans les établissements scolaires publics et privés du Sénégal continue de susciter des réactions. Le secrétaire général national du Syndicat des enseignants libres du Sénégal (SELS) Hamidou Diedhiou interrogé par Sud Quotidien a exprimé son accord de principe tout en appelant à plus de discernement et de concertation dans la mise en œuvre de la mesure.
M. Diédhiou relève une contradiction entre l’introduction de l’intelligence artificielle (IA) dans le système éducatif et l’interdiction du téléphone qui constitue pourtant un outil de base pour accéder à ces technologies. « Quand j’ai vu ce communiqué sur le téléphone j’étais obligé de repartir relire celui sur l’IA. C’est comme s’il apparaissait une sorte de contradiction : j’introduis l’IA mais j’interdis le support qui permet de l’utiliser » a-t-il déclaré.
Tout en reconnaissant les effets pervers du téléphone en classe notamment la distraction liée aux réseaux sociaux le syndicaliste estime que l’interdiction dans les salles de classe peut être bénéfique. « L’élève est parfois physiquement en classe mais mentalement ailleurs sur TikTok ou autre. C’est une réalité qu’il ne faut pas ignorer » affirme-t-il.
Cependant il alerte sur les enjeux sécuritaires et sociaux qu’implique cette interdiction. Pour de nombreux élèves issus de milieux modestes le téléphone est un outil de survie permettant aux parents de rester en contact avec leurs enfants notamment pour des questions de transport ou de sécurité.
La mise en application pratique de l’arrêté pose également problème selon M. Diédhiou. Il évoque les difficultés logistiques liées à la collecte et la restitution des téléphones dans les établissements : « Soit on perd les téléphones soit on les mélange. Ça renforce le caractère complexe de la décision ».
Pour le SG du SELS le ministère aurait dû prendre le temps de consulter l’ensemble des acteurs du secteur éducatif avant de prendre une décision aussi sensible. Il plaide pour une mise en œuvre progressive avec des phases d’évaluation permettant d’ajuster la mesure si nécessaire. « Ce n’est pas une honte de revenir sur une décision en cours d’application, elle pose plus de problèmes qu’elle n’en résout » soutient-il.
En attendant, Hamidou Diédhiou appelle les établissements à prendre des dispositions pratiques dès cette rentrée pour appliquer la mesure tout en laissant la porte ouverte à une réflexion continue et collective afin de parvenir à une régulation plus équilibrée de l’usage du téléphone en milieu scolaire.