Le climat de psychose a atteint son paroxysme mardi dernier, lorsqu’un braquage à main armée a visé des collecteurs entre Niadio et Boussoloum, dans la commune de Boutoupa Camaracounda (Ziguinchor). Les assaillants sont repartis avec près de 30 millions de francs CFA, installant un profond sentiment d’insécurité parmi les acteurs de la filière.
« On ne sent pas la présence de l’État à nos côtés », dénoncent plusieurs collecteurs, qui accusent le gouvernement de laisser la filière livrée à elle-même.
Pour Boubacar Konta, président de l’Interprofession Cajou Sénégal, ce drame est le résultat direct du manque de structuration de la campagne. Aucun Conseil régional de développement (CRD) n’a été organisé, alors qu’il aurait permis de planifier les actions de sécurité et d’impliquer les forces de l’ordre.
Autre point de discorde : le ministre du Commerce, attendu pour lancer officiellement la campagne, brille toujours par son absence. Une attitude jugée inacceptable par les professionnels, dans un contexte aussi tendu.
Les unités de transformation, déjà fragilisées par la baisse des rendements, réclament un stock de sécurité de 7.000 tonnes pour maintenir leurs activités et préserver les milliers d’emplois locaux. Faute de soutien, elles craignent de devoir fermer leurs portes.
En l’espace d’une semaine, le kilo de noix d’anacarde est passé de 800 à 600 francs CFA, entraînant des pertes importantes pour les collecteurs, souvent endettés auprès des banques.
« Si rien n’est fait, ce sera comme en 2022 : faillites en chaîne, dettes impayées, collecteurs en prison », prévient M. Konta.
Malgré les instructions claires du Premier ministre Ousmane Sonko lors du dernier Conseil interministériel pour sécuriser la chaîne d’exportation, aucune mesure concrète n’a été prise, selon les acteurs de la filière.
« Nous avions placé beaucoup d’espoir dans ce gouvernement dirigé par un fils de la région. Aujourd’hui, c’est le KO total. La filière est à l’agonie », déplore le président de l’interprofession, qui appelle à des actions urgentes et ciblées.
La filière cajou représente plus de 100.000 tonnes de production annuelle et génère environ 80 milliards de francs CFA, faisant vivre des milliers de familles dans le sud du pays. Pourtant, elle se trouve aujourd’hui au bord de l’effondrement.
Les professionnels lancent un appel pressant à l’État pour qu’il prenne ses responsabilités avant qu’il ne soit trop tard. Il y va de la survie d’un secteur stratégique, mais aussi de la stabilité économique et sociale de toute une région.