Dakar, mai 2025 – Un vent de réforme souffle sur le secteur médiatique sénégalais, suite à une révélation fracassante : près de 800 millions de francs CFA issus de l’aide publique à la presse ont été détournés en 2023. Face à ce scandale, l’État a décidé de suspendre l’aide pour l’année 2024, avant de poser les bases d’une refondation profonde du système.
Un détournement massif
Le ministère de la Communication a levé le voile sur une gestion opaque du Fonds d’appui et de développement de la presse (FADP). D’après un rapport rendu public début mai, 800 millions CFA – soit 45 % des 1,9 milliard alloués en 2023 – n’ont jamais été perçus par les entreprises de presse. Pire encore, ces fonds ont été orientés vers des structures ou activités sans lien direct avec le secteur, mettant en lumière un système de redistribution détourné de ses objectifs initiaux.
L’État suspend l’aide 2024 et réforme le dispositif
En réponse, l’aide publique à la presse pour 2024 a été purement et simplement annulée. Le gouvernement veut prendre le temps d’assainir le dispositif et de bâtir une nouvelle stratégie fondée sur la transparence, l’efficacité et la bonne gouvernance. « Nous devons rompre avec les pratiques anciennes et instaurer un nouveau modèle qui soutient véritablement le développement du secteur », a affirmé le ministre de la Communication.
Un recentrage sur les entreprises formelles
Dès 2025, le montant de l’aide sera porté à 2,7 milliards de francs CFA. Mais seuls 258 organes de presse officiellement enregistrés et conformes au Code de la presse y auront accès, contre 535 auparavant. Cette réduction drastique vise à écarter les entités fictives ou non professionnelles qui profitaient indûment de la manne publique.
Vers un fonds orienté développement
Le FADP nouvelle version sera désormais orienté vers le développement durable des entreprises de presse, avec des critères clairs : investissement dans les ressources humaines, modernisation des équipements, digitalisation et respect des obligations fiscales. L’objectif affiché est de transformer ce fonds en véritable levier stratégique, capable de structurer durablement le paysage médiatique national.
Une exigence de transparence accrue
Dans ce contexte de réforme, le Conseil des éditeurs et diffuseurs de presse du Sénégal (CDEPS) a appelé à une transparence totale dans la gestion du fonds. Il exige une enquête approfondie sur les 800 millions détournés et réclame que toute la lumière soit faite sur les bénéficiaires réels de l’aide passée.
Alors que le Sénégal entre dans une nouvelle ère de gouvernance publique, la refonte de l’aide à la presse pourrait bien constituer un tournant décisif pour la crédibilité et l’indépendance du journalisme dans le pays.